Du patriarche (Abraham, Isaac, Jacob) à
Dieu ("Dieu est mon berger") en passant par la figure du
roi (David), le berger est omniprésent dans les textes bibliques.
Pourquoi ?
Si la métaphore du bon berger
conduisant son troupeau nous semble aller de soi, ainsi que
l'élément biographique de ces personnages fameux évoluant dans un
contexte proche-oriental très ancien, ces textes reflètent-ils tous
pour autant une réalité historique ?
A l'époque de leur rédaction (-Ve
siècle), le métier de berger n'est plus depuis longtemps le pivot
de l'organisation sociale sophistiquée du pays (La Judée). Les
textes conservent-ils donc les traces d'une réalité historique
antérieure ? C'est peut-être le cas du patriarche du Nord le plus
ancien, Jacob, dépeint dans un contexte pastoral technique et
détaillé, renvoyant à une organisation agro-pastorale autour du
site de Béthel (- XI e ?), où le mouton occupe un place centrale,
et pas seulement pour sa viande.
Mais pour les autres personnages,
particulièrement le roi David, ce trait inséré dans sa geste
pourrait être le reflet d'une conception mésopotamienne de la
royauté. En effet, divers textes mésopotamiens présentent les
attributs virils de rois légendaires divinisés où la force
guerrière du lion côtoie le pouvoir législateur du berger. Et de
fait, la racine sémitique pour dire cette fonction désigne à la
fois le fait de conduire un troupeau et le fait d'établir des lois
pour tout un pays. Ainsi David, le roi berger, est-il construit comme
l'égal des rois/dieux les plus célèbres du Proche-Orient ancien.
Ainsi Yahvé, dieu d'un modeste pays, est-il hissé au rang d'une
divinité aussi puissante que celles des vastes empires
mésopotamiens.
Anne PELLEGRINI
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